Quand un constructeur généraliste comme Renault se lance dans la commercialisation d’un roadster, ça donne quelque chose d’assez radicale, le Spider ! On attribue souvent l’origine du Renault Spider au concept car Laguna présenté au salon de Paris en 1990. Si la filiation de style entre les 2 produits est troublante, l’histoire n’est pas si simple.
Un contexte favorable
Au début des années 90, Renault est dans une spirale positive. Raymond Lévy a remis l’entreprise à flot et Louis Schweitzer qui lui succède en 1992 a pour mission de mettre sur orbite la firme au losange qui se privatise. Renault rencontre le succès aussi bien sur le plan commercial que sportif en dominant la formule 1 en tant que motoriste.
Dans le même temps, la marque Alpine propriété du groupe est moribonde. L’A 610 est en fin de vie et le coupé sportif qui doit lui succéder (nom de code W 17) n’est pas validé, la rentabilité du projet étant jugée plus qu’incertaine. Cette décision, que Louis Schweitzer reconnaît comme difficile, signe l’arrêt de mort (provisoire) de la marque Alpine.
Pourtant Renault entend bien capitaliser sur ses succès sportifs et Christian Contzen alors président de Renault Sport planche sur l’idée d’une voiture ludique destinée à une formule de promotion sur circuit. Le projet rencontre l’approbation de la direction et va même plus loin puisqu’il est décidé d’en faire une version routière en petite série. L’usine Alpine de Dieppe bientôt sans activité est toute désignée pour être au coeur de ce nouveau projet !
Une conception châssis externalisée…
Il s’agit de concevoir un véhicule ultra léger aussi à l’aise sur circuit que sur route mais financièrement abordable. Il faut donc un produit facile à fabriquer, mais doté de qualités de liaisons au sol hors pair. Le cahier des charges du projet W 94 (futur Renault Spider) est donc totalement atypique pour une firme comme Renault.
Christian Contzen comprend que pour mener à bien son projet, il faut sortir des sentiers battus d’autant plus que le budget est limité (environ 10 millions de francs à l’époque). Il fait d’abord appel à un génial autodidacte, Claude Fior, qui avec son entreprise Nogaro Technologies, va concevoir un châssis en aluminium dont il est un expert reconnu.
En interne Renault n’a pas les compétences pour travailler l’aluminium. Pour la fabrication de la matière première, il sera fait appel à la firme norvégienne Hydro. L’assemblage des châssis se fera elle au Danemark, avant d’être expédiés à Dieppe.
Mais un design maison !
Pour le design, c’est en interne que les choses se passent puisqu’il faut tout de même donner au Spider une identité Renault. C’est là ou l’influence du concept Laguna est incontestable comme elle avait également joué sur le design du projet mort né Alpine W 71.
Patrick Le Quément, patron du Design chez Renault, confie la responsabilité à Yves Legal de lancer un concours interne auprès des jeunes designers. Pour l’anecdote c’est Benoît Jacob qui dessinera plus tard la BMW i8 qui le remporte. Yves Legal peaufinera ensuite le dessin final.
Un Spider conçu en un temps record !
Il n’aura fallu qu’un peu plus d’un an entre la première réunion technique du projet fin 2013 et sa présentation au salon de Genève en Mars 2015. C’était l’une des conditions du cahier des charges pour limiter les coûts. Même si la commercialisation ne se fera que dans la seconde partie de l’année 1995. Le premier Spider sortira finalement de l’usine Alpine en Décembre 1995.
Des données techniques prometteuses
Lors de sa présentation à Genève, le Spider Renault ne laisse pas indifférent avec un style résolument agressif et ses portes en élytre comme dans une Lamborghini ! Petit clin d’oeil à Alpine, les jantes sont reprises de l’A 610.
Sa définition technique fait saliver les puristes : un châssis tout en aluminium, une coque en fibre, des sièges fixes associés à un pédalier réglable et un moteur en position centrale arrière, tous les ingrédients d’une machine à sensations ! Le poids annoncé dans un premier temps à 790 kg sera finalement de 930 kg et même 980 kg pour la version avec pare brise, on reste tout de même sous la tonne.
Vu l’esprit économique du projet, c’est dans les moteurs Renault existants que l’on va puiser la motorisation. Dans un premier temps, le Spider Renault va être équipé du moteur de la Clio Williams. Il développe 150 ch et est capable avec sa boîte 5 vitesses de propulser le Spider à 100 km/h en 6,9 s, le 1000 mètres en 27,45 s pour une vitesse maxi de 215 km/h. Des performances honnêtes sans plus.
A partir de Janvier 1996, il cède sa place à un 4 cylindres plus moderne issu de la Mégane. Il répond aux normes anti-pollution Euro 96 et est moins cher à fabriquer ! Les caractéristiques des 2 motorisations étant très proches, les performances annoncées restent inchangées.
Pour l’anecdote, d’autres éléments seront repris de la gamme Renault : le compteur central de la Twingo, les roulements de l’espace, les étriers de l’Alpine A 610 ou encore le frein à main de la safrane Biturbo.
Renault Spider, 1 style, 2 ambiances !
Le Spider est d’abord présenté dans sa version SV comme saute vent. La pare brise est ici remplacé par une sorte d’aileron en lieu et place, censé canaliser les flux d’air. Même si officiellement le simple port de lunettes suffit pour conduire, le port d’un casque intégral est toute de même plus efficace, ce qui rend l’expérience de conduite quelque peu radical ! On est vraiment là très proche d’une moto à 4 roues !
Heureusement pour sa carrière commerciale, le Renault Spider est commercialisé rapidement dans une version avec pare brise qui se vendra trois fois plus pour un surcoût relativement modeste (5000 francs) mais qui alourdit quand même le Spider Renault de 50 kilos. A noter que contrairement aux idées reçues, la version pare brise a été conçue en amont du modèle SV.
L’intérieur correspond bien aussi à l’esprit minimaliste du Renault Spider sans être déplaisant. Face au conducteur, 3 petits compteurs ronds rappelant l’univers de la moto, un afficheur central à leds, une mini console centrale couleur carrosserie et c’est tout !
Quelques éléments de «confort» sont proposés en option : une radio, une sur-moquette, un porte-bagages, des jantes spécifiques et pour la version pare-brise une capote en toile. Pour cette dernière, c’était plus une protection de secours car il ne fallait pas dépasser les 90 km/h. Pour la sécurité, un airbag conducteur était disponible en option.
Il n’est pas compliqué de configurer son Spider Renault. 2 versions et quelques options comme nous l’avons vu et 3 couleurs : jaune, bleu et rouge. Le gris viendra compléter la palette de couleurs en fin de carrière.
Sur la route en Renault Spider
Tous les essayeurs sont unanimes, le Renault Spider est fun, c’est un véritable jouet ! Avec son caractère de propulsion et en l’absence de toutes béquilles électroniques, le Spider est une vraie machine à piloter qui peut même devenir délicat à la limite.
La rigidité de son châssis et sa direction sans assistance lui permettent d’être particulièrement efficace sur les routes sinueuses. Le confort de ses suspensions étonnent.
Mais sa motorisation de 150 ch sans être amorphe est souvent jugée un peu juste. Quelques chevaux supplémentaires auraient été les bienvenus. C’est pourquoi d’ailleurs de nombreux exemplaires ont été upgradés avec des puces permettant d’atteindre une puissance de l’ordre de 180 ch, donnant au Spider un peu plus de peps.
Par rapport à sa principale rivale, la Lotus Elise, ses 200 kg de moins la rendent incontestablement plus vive que le Spider.
Acheter un Renault Spider
La production du Renault Spider était limitée dès le départ du projet. Seulement 1 726 exemplaires dont 90 versions compétition (Trophy) ont été produits. Pour rappel chaque exemplaire était monté à la main et demandait environ 90 heures de montage.
Ce qui fait que le Renault Spider était déjà un collector au moment de sa commercialisation. Ce qui a pour conséquence positive (ou négative si on est acheteur !) que sa côte n’a pas baissé loin de là ! Son prix catalogue était de 195 000 Francs soit 30 000 Euros. Aujourd’hui en occasion, la fourchette est de 40 000 € jusqu’à 55 000 € pour un exemplaire état concours.
La plupart des exemplaires ont peu roulé. Certains sont affichés avec seulement 2000 kilomètres au compteur. Méfiance cependant car l’afficheur central indiquant les kilomètres est très facile à changer… La plus grande attention doit être également apportée aux exemplaires ayant fait de la piste de manière assidue. Cela entraîne une usure prématurée de certaines pièces, notamment trains roulants et système de freinage.
Pour le reste, la fiabilité est au rendez-vous. Pas de gros défauts répertoriés à ce jour. Parmi les points à vérifier :
- Courroie de distribution : elle doit être changée tous les 120 000 km ou 5 ans sur toutes les versions.
- Soufflet de cardan arrière droit : sa trop grande proximité des tubulures d’échappement engendre une usure prématurée.
- Instrumentation digitale : elle supporte mal l’exposition aux intempéries.
- Câbles ouvrant les capots avant et arrière : ils ont tendance à casser prématurément.
- Bulle de phare : initialement proposée en verre, elles deviennent introuvables. A remplacer par des modèles de refabrication en plastique.
Si beaucoup de pièces sont disponibles dans le réseau Renault car communes avec des modèles de grande diffusion, certaines, spécifiques au Spider, se font en revanche de plus en plus rares. Pour ne rien arranger, le stock des pièces d’origine a été vendu il y a quelques années à un marchand allemand. Cependant, certaines sont régulièrement refabriquées notamment par Alpine. Le prix des pièces est donc variable suivant leur rareté.
Quand à l’entretien courant, la mécanique étant simple, elle peut se faire dans beaucoup de garages et le prix des révisions est abordable. Cependant il est conseillé de s’adresser aux concessions et agents Renault ayant l’agrément Renault Sport qui connaissent bien le modèle.
Pour en savoir plus sur le Spider Renault
Le forum toujours très actif du site Renault Spider.fr montre à quel point il s’agit d’une voiture de passionnés. Beaucoup d’informations intéressantes.
Egalement le forum Alpine Renault.com