Jensen Interceptor, atypique et cosmopolite

Sans qu’il y ait véritablement d’explications, il y a des voitures qui nous interpellent plus que d’autre. La Jensen Interceptor rentre incontestablement dans mon panthéon automobile personnel. Et puis cette voiture a mon âge !

Déjà son nom : “Jensen Interceptor”, un nom qui évoque à la fois la distinction britannique, la vitesse, la puissance, un nom qui claque ! Et puis la recette est bien séduisante : prenez une dose de design italien à son meilleur niveau, une qualité perçue toute britannique notamment à l’intérieur, à base de cuir Connoly et de moquettes épaisses. Ajoutez un V8 Chrysler aux borborygmes évocateurs. Assaisonnez le tout avec une pointe de haute technologie et vous obtenez une des GT les plus désirables des années 60 !

Avant l’Interceptor

Contrairement à ce que j’ai longtemps pensé, la Jensen Interceptor n’est pas un “one shot” d’un petit artisan britannique confidentiel. Créée en 1935 par les frères Jensen, leur entreprise est un constructeur à part entière. Petit certes, mais qui avant son modèle phare avait déjà à son actif la Jensen Interceptor première du nom, la 541, ou encore la CV8. Tous ces modèles se caractérisaient par leurs originalités techniques à base de carrosserie en fibre de verre, 4 freins à disque ou encore un design décalé comme celui de la CV8.

La CV8, un design décalé…

Jensen parallèlement à la production de ses propres modèles avait une activité de carrossier pour d’autres constructeurs. On lui doit notamment la production des premières séries de la Volvo P 1800 !

Ironie de l’histoire, la Jensen Interceptor qui nous intéresse ici et qui va véritablement faire connaître la firme est le premier modèle conçu et produit après le retrait des pères fondateurs de la marque…

L’interceptor, une GT mondiale

La Jensen Interceptor est une voiture totalement atypique à plus d’un titre. D’abord ses origines cosmopolites : elle est de conception britannique et assemblée dans l’usine de Kelvin Way à West Bromwich à proximité de Birmingham. Mais son design a été pensé par l’italien Touring, les panneaux de carrosserie sont également fabriqués dans la péninsule italienne par Vignale. Enfin, elle est motorisée par un gros V8 Chrysler de plus de 300 ch typiquement américain.

Présentée en 1966 en Angleterre, l’Interceptor affiche un style très moderne pour l’époque et représentatif de ses “pays d’origine”. D’abord sa bulle arrière en verre est une véritable innovation et une signature stylistique indélébile. Si l’avant est plus classique, il fait immédiatement pensé à une Aston Martin notamment avec sa calandre à la fois fine et agressive et ses doubles phares. Le long capot moteur très américain permet de donner à l’ensemble de la ligne un bel équilibre.

Une bulle arrière caractéristique..

L’intérieur plus classique est néanmoins tout aussi intéressant. Si les sièges font penser à de véritables fauteuils de salon dans un esprit très British, le tableau de bord surtout celui de la première version n’aurait pas dépareillé dans une Alfa ou une Ferrari !

Un intérieur très italien..

J’ai trouvé peu d’essais sur le modèle. Néanmoins la plupart se rejoignent dans leurs conclusions. Les impressions de conduite sont un peu le reflet de ses origines : un confort très British qui donne envie de voyager loin mais qui se paye par un poids qui se fait sentir. Le tout est compensé par une mécanique qui montre toute sa puissance et des suspensions très évoluées pour l’époque qui donne à l’ensemble une tenue de route très correcte.

Ainsi la Jensen Interceptor plaisait à tout le monde, ce qui explique incontestablement les raisons de son succès. Aux anglais bien sûr qui n’hésitaient pas à la comparer aux Aston Martin. Mais aussi aux européens pas insensibles à son style très italien et son comportement équilibré. Et enfin aux Américains pas dépaysés par son big-block et sa transmission automatique permettant une conduite coulée et son intérieur luxueux.

Une longue carrière

L’Interceptor a été officiellement commercialisée de 1966 à 1976. Une longévité qui tient du miracle quand on sait que la marque a connu 3 propriétaires différents pendant cette décennie qui a également connu 2 chocs pétroliers. Mais l’incontestable succès commercial du modèle lui a permis de survivre en s’adaptant à chaque fois à la situation du moment.

Ainsi en 10 ans, la Jensen Interceptor a connu 4 versions différentes sans compter les versions coupé et cabriolet en fin de carrière ! Il serait trop fastidieux ici de vous détailler les détails de chacune des versions. Simplement voici la chronologie des modèles avec le nombre d’exemplaires vendus pour chacun :
– Jensen Interceptor MK I (1966-1970): 1024 exemplaires
– Jensen Interceptor MK II (1969-1971): 1128 exemplaires
– Jensen Interceptor MK III (1971-1973): 2477 exemplaires
– Jensen Interceptor MK III 7,2 (1974-1976): 1779 exemplaires
– Jensen Interceptor SP (1971-1973): 232 exemplaires 
– Jensen Interceptor Cabriolet (1973-1976): 509 exemplaires
– Jensen Interceptor Coupé (1975-1976): 46 exemplaires
Total : 6595 exemplaires

En cabriolet, elle conserve une certaine classe…
En coupé, c’est plus discutable…

La Jensen FF, fausse jumelle

La Jensen FF, bien avant les Audi Quattro

Nous n’avons évoqué jusqu ici que la Jensen Interceptor qui est une pure propulsion. Il existe une autre Jensen commercialisée à la même époque baptisée FF. Il est très facile de confondre les 2 modèles puisque la FF reprend la carrosserie de l’Interceptor avec simplement un empattement allongé. La FF se différencie par sa transmission intégrale qui est une véritable prouesse technologique pour l’époque.
Mais Jensen n’avait manifestement pas les moyens pour développer correctement cette technologie complexe et d’avant garde pour l’époque. Ainsi de nombreux problèmes de fiabilité, associé à un prix de vente très élevé et une disponibilité exclusivement en conduite à droite ont amené la FF à une diffusion très confidentielle (environ 300 exemplaires)

Pour en savoir plus

De nombreux sites d’automobiles classiques ou sportives ont déjà évoqué l’Interceptor. Si vous souhaitez avoir plus de détails sur la chronologie et l’évolution du modèle, vous pouvez consulter le guide d’achat de l’excellent site de l’Automobile Sportive

Pour avoir des infos de référence et si vous êtes anglophones, vous pouvez également consulter le site très actif et officiel des propriétaires de Jensen, ils sont encore très nombreux ! Site officiel des propriétaires Jensen

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